Stratégie financière
A partir de la deuxième moitié des années 90, le financement des investissements publics locaux a connu de profondes modifications. La contribution des ressources externes (le recours à la dette) au financement de l’investissement a diminué fortement, tandis qu’une large part des investissements est désormais autofinancée.Deux schémas d’analyse financière permettent d’appréhender ces modifications profondes, l’un qualifié de " classique ", l’autre appelé ici " schéma alternatif ".
LE SCHÉMA CLASSIQUE DU FINANCEMENT DES INVESTISSEMENTS LOCAUX :
Cette première approche est conforme aux règles comptables que doivent respecter les collectivités locales pour la présentation de leurs comptes, suivant lesquelles le budget est en équilibre réel (art. L 1612-4 du CGCT) “ lorsque la section de fonctionnement et la section d’investissement sont respectivement votées en équilibre, les recettes et les dépenses ayant été évaluées de façon sincère, et lorsque le prélèvement sur les recettes de la section de fonctionnement au profit de la section d’investissement, ajouté aux recettes propres de cette section, à l’exclusion du produit des emprunts, et éventuellement aux dotations des comptes d’amortissements et de provisions, fournit des ressources suffisantes pour couvrir le remboursement en capital des annuités d’emprunt à échoir au cours de l’exercice”. Selon cette vision, l’épargne brute, qui mesure l’excédent des recettes courantes sur les dépenses de fonctionnement, sert d’abord à couvrir le remboursement des dettes qui s’amortissent ; ce n’est qu’ensuite - au stade de l’épargne disponible - qu’elle peut servir à financer une partie des dépenses d’investissement de l’année. Si l’épargne disponible doit être, dans une vision simplifiée, simplement non négative, elle atteint dans les faits des valeurs extrêmement importantes, s’élevant aujourd’hui à 111 milliards de francs, contre 46 milliards en francs constants en 1982. Elle contribue au financement de 48 % de l’investissement, contre 29 % en 1982.
LE SCHÉMA "ALTERNATIF" DU FINANCEMENT DES INVESTISSEMENTS LOCAUX :
L'épargne brute sert d’abord à financer les investissements de l’année - il existe donc une différence entre l’usage qui est fait de l’épargne brute selon ce schéma de nature économique et l’usage qui en est fait selon la présentation habituelle des budgets locaux. Ensuite, une fois l’épargne brute utilisée, les collectivités locales ont, en général, un besoin de financement qu’elles satisfont en recourant à l’emprunt. Mais les collectivités doivent par ailleurs rembourser les emprunts antérieurs qui s’amortissent. On considère donc, selon cette approche, qu’est constituée au sein de la section d’investissement une partie purement financière comportant, en recettes les emprunts et en dépenses les remboursements de dette, et qui contribue par son solde (appelé flux net de dette) au financement des dépenses d’investissement. Fait historique, alors que le besoin de financement, qui s’apparente à quelques nuances comptables près au flux net de dette, avait atteint près de 1 % du PIB en 1982 et avoisinait de l’ordre de 0,2 % à 0,3 % du PIB jusque dans la première moitié des années 90, l’effort d’assainissement des finances publiques locales a permis de dégager à partir de 1996 une capacité de financement de l’ordre de 0,2 % du PIB, la somme des recettes d’investissement et de l’épargne brute dépassant à présent le montant des dépenses d’investissement ; en d’autres termes, une partie de l’épargne brute est dorénavant consacrée au désendettement ( - 25 milliards de francs environ ces trois dernières années).
COMPARAISON DES DEUX APPROCHES :
L’avantage de la seconde approche, d’une présentation économique des investissements locaux, ne réside pas seulement dans ses vertus “ illustratrices ”. La première méthode, “ canon ” de la comptabilité locale, est indispensable pour la vérification des équilibres. Néanmoins, la difficulté reste l’analyse des remboursements de dette, qui doit s’attacher à éliminer les mouvements comptables liés à la gestion de la dette - les opérations d’aménagement de dette “ gonflent ” les remboursements et donc obèrent l’épargne disponible. Ne s’attachant qu’au solde “ Emprunts - Remboursements ”, l’analyse économique n’est en revanche pas affectée par ce type d’opérations financières. La deuxième méthode permet ainsi de relativiser la politique de recours à l’emprunt en analysant en parallèle les remboursements de dette. Une politique de gestion active de la dette ou un recours à des emprunts courts par exemple génèrent des remboursements élevés qui pénalisent l’épargne disponible, faisant apparaître un autofinancement réduit. En prenant comme référence la variation de la dette (Emprunts - Remboursements), la politique de gestion de dette n’influe plus sur la lecture économique de l’autofinancement. Enfin, d’un point de vue macro-économique, cette présentation des comptes, qui met en évidence un besoin ou une capacité de financement, est celle appliquée à l’ensemble des agents économiques, notamment à l’Etat et aux administrations de sécurité sociale, mais également aux ménages et aux entreprises. Le recours à cette présentation permet donc de comparer les conditions d’équilibre des comptes des différents agents économiques.
CONCLUSION :
S’intéresser au schéma de financement, c’est ainsi mettre en évidence le rôle de l’autofinancement (ressources directes d’investissement + épargne), mais aussi de la dette, dans le financement des dépenses d’investissement. Dans ce schéma, toutes les variables doivent être prises en compte, et aucune d’entre elles ne doit être considérée comme “ figée ” ; c’est en définitive une illustration de la stratégie de financement globale du budget d’une collectivité. L’épargne notamment doit pouvoir s’ajuster en fonction du niveau d’investissement, et des marges d’endettement disponibles. En d’autres termes, lorsque par exemple l’investissement diminue, l’épargne peut baisser sans que l’on considère pour autant que la situation financière de la collectivité se dégrade.
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